Photovoltaïque : la fin du tarif d’achat garanti pour les installations de moyenne puissance et le basculement vers un système d’appel d’offre simplifié
- Louis Dusanter
- il y a 2 jours
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À partir du 22 septembre 2025, les installations photovoltaïques de moyenne puissance, comprises entre 100 et 500 kWc, ne bénéficient plus du tarif de rachat garanti par EDF. Cette date marque un tournant dans la politique française de soutien à l’énergie solaire en créant un nouveau mécanisme d’appel d’offres simplifié, plus concurrentiel et encadré. Ce changement important est attendu mais suscite notamment l’inquiétude des professionnels de la filière du photovoltaïque. Alter Watt vous explique pourquoi.

Depuis plus de quinze ans, le tarif d’achat garanti a servi de moteur au développement du solaire en France
Le dispositif de tarif d'achat garanti de l'électricité photovoltaïque remis en question
Depuis plus de quinze ans, le tarif d’achat garanti a servi de moteur au développement du solaire en France. En assurant aux producteurs un prix fixe de rachat de leur électricité par EDF Obligation d’Achat (EDF OA), il permettait de sécuriser les investissements et de faciliter les prédictions de rentabilité des projets même pour les acteurs plus petits et moins structurés. Jusqu’au 30 juin 2025, les installations de 100 à 500 kWc pouvaient encore vendre leur électricité à un tarif fixe, mais la logique change ce 22 septembre 2025 : place à la mise en concurrence !
À partir du 22 septembre 2025, les projets compris dans cette tranche de puissance doivent obligatoirement candidater à un appel d’offres simplifié (AOS PPE2 Petit PV Bâtiment), instruit par la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE). Le prix plafond pour la première période (jusqu’à Novembre 2025) est fixé à 88,6 €/MWh, quel que soit le type de projet (bâtiment existant, neuf, ombrière…) Il est maintenant aussi obligatoire de déposer une caution de 10 000€ pour chaque dossier pour garantir le sérieux des projets déposés.
Pourquoi ce changement ?
Le gouvernement justifie cette réforme par plusieurs objectifs :
Rationaliser la dépense publique :
Les tarifs d’achat garantis représentaient un coût budgétaire croissant, d’autant que les prix de l’électricité sur les marchés ont fortement augmenté ces dernières années. L’État estime qu’il n’est plus nécessaire de garantir des prix élevés pour des projets de taille significative, et qu’ils sont capables de se financer dans un cadre concurrentiel.
Cette rationalisation passe donc inévitablement par une réduction de la quantité de projets développés puisque le volume de puissance installée qui sera lauréat de l’AOS (Appel d’offre simplifié) sera largement inférieur au volume de puissance qui était déposé en guichet ouvert à chaque trimestre.
Mieux orienter les soutiens :
Le maintien de tarifs avantageux pour les petites installations (moins de 100 kWc) vise à encourager une production locale et décentralisée. Les projets de moyenne et grande ampleur devront maintenant prouver leur compétitivité.
Sécuriser les projets :
La caution de 10 000 € et l’obligation de fournir un bilan carbone des modules (inférieur ou égal à 740 kg eqCO2/kWc) permettent de s’assurer que seuls les projets aboutis et respectueux de l’environnement voient le jour.
Quelles sont les conséquences attendues par les acteurs du marché du photovoltaïque ?
Pour les gestionnaires de grands projets :
La transition vers un système d’appel d’offres représente un changement important. Sans tarif prédéterminé, les développeurs de projets de parcs photovoltaïques devront désormais proposer un prix compétitif, avec le risque de ne pas être retenu. Cette incertitude pourrait ralentir certains projets, en particulier dans le monde agricole ou au sein des petites collectivités qui comptaient sur la stabilité du tarif d’achat.
À court terme, de nombreux acteurs ont cherché à sécuriser leurs projets avant la date limite pour bénéficier du dispositif garanti. Une fois la date butoir passée, certains redoutent un effet de seuil : de grands projets pourraient être fragmentés pour rester sous la barre des 100 kWc et conserver un cadre plus favorable.
En revanche, les grands groupes, mieux structurés et disposant de moyens financiers importants, pourraient avoir moins à craindre de la nouvelle logique de marché et tirer leur épingle du jeu, accentuant la concentration des acteurs du secteur.
À l’inverse, les petits acteurs (agriculteurs, PME, artisans) pourraient être pénalisés par la caution de 10 000 € et la complexité des appels d’offres.
Pour les gestionnaires de petites installations (moins de 100 kWc) :
La donne reste différente. Les installations de moins de 9 kWc conservent leurs conditions actuelles, tandis que celles de 9 à 100 kWc voient leurs tarifs légèrement ajustés mais toujours garantis :
Vente du surplus : 7,31 c€/kWh pour les installations de 9 à 100 kWc.
Vente totale : 11,26 c€/kWh pour les installations de 9 à 100 kW.
Ces tailles d’installations devraient continuer d’attirer les particuliers et les petites entreprises souhaitant investir dans l’autoconsommation, d’autant que la prime à l’autoconsommation (80 €/kWc pour les installations jusqu’à 9 kWc) reste en place.
Pour l’État et EDF
L’État mise sur cette réforme pour réduire les coûts publics tout en maintenant le rythme de développement photovoltaïque. En introduisant une logique de marché, le gouvernement espère aussi améliorer la compétitivité du secteur et réserver les aides aux projets jugés prioritaires. Le calendrier serré et la complexité administrative pourraient cependant décourager certains investisseurs.
Une réorientation stratégique de la politique énergétique sur le tarif d’achat garanti photovoltaïque
Cette évolution traduit une réorientation claire de la politique énergétique française : l’État souhaite concentrer son soutien financier sur les projets de moindre envergure décentralisés tout en intégrant les acteurs professionnels dans une logique de marché. En misant sur la compétition via les appels d’offres, le gouvernement espère réduire les coûts, améliorer la compétitivité du solaire et réserver les aides aux projets les plus vertueux.
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